En voilà une mesure qui a récemment défrayé la chronique. Au-delà des batailles politiques, que se cache exactement derrière ce projet de « tarification progressive, solidaire et familiale » récemment adopté par le Gouvernement wallon ?
Ses raisons d'être
Actuellement, plus la consommation d'électricité est importante, moins on paie cher son kWh. Les tarifs sont donc dégressifs. Cela signifie par exemple qu'un ménage qui consomme en moyenne 600 kWh par an paie son kWh 33 cent l'unité, tandis qu'un ménage consommant 7500 kWh se voit lui facturer son kWh à seulement 20 cent. En cause : les termes fixes de la facture !
Pour beaucoup, cette réalité apparait comme étant toute particulière dans un contexte de raréfaction des ressources. Elle incite à consommer davantage, alors qu'il convient de limiter cette consommation et d'orienter notre modèle de société vers la sobriété et l'efficacité énergétique. De plus, différentes études concordent. En moyenne, plus on a de revenus, plus on consomme d'électricité. L'actuelle tarification dégressive de l'électricité favorise donc davantage les ménages aisés.
Que prévoit la nouvelle mesure ?
Le Gouvernement wallon entend donc avec ce nouvel arrêté renverser la vapeur et rendre la tarification progressive (plus je consomme, plus je paie). Il espère ainsi également inciter les ménages à consommer moins et répondre à un enjeu social de taille : l'accès à l'énergie pour les consommateurs précarisés.
Le Gouvernement prévoit plus précisément que tous les ménages wallons perçoivent dès janvier 2015 une allocation équivalente à un certain nombre de kWh en fonction du nombre de personnes composant le ménage. C'est le gestionnaire de réseau de distribution qui sera chargé d'octroyer l'allocation aux ménages résidant sur son territoire via la facture de régularisation ou de clôture.
Un jeu à somme nulle
A combien de kWh « gratuits » équivaut l'allocation ?
- 400 kWh pour une personne isolée,
- 500 kWh pour les ménages de 2-3 personnes,
- 600 kWh pour les ménages de 4 personnes,
- 700 kWh pour les ménages de 5-6 personnes,
- 800 kWh pour les ménages de 7 personnes et plus,
- 800 kWh pour les ménages sous tarif social.
La mesure se veut neutre pour le budget de la Région wallonne. Au-delà d'un certain niveau de consommation, les ménages financeront davantage la mesure qu'ils n'en bénéficient et verront dès lors leur facture augmenter. Deux facteurs influeront donc l'impact de la mesure sur la facture des ménages : le nombre de personnes qui le composent - et donc le montant de l'allocation - et le niveau de consommation.
Qui est concerné ?
Les consommateurs résidentiels, les autoproducteurs, à l'exception des ménages qui se chauffent à l'électricité comme mode de chauffage principal, ou via une pompe à chaleur.
Par contre, les clients professionnels, les agriculteurs et les pouvoirs publics et les résidences secondaires ne se verront pas appliquer la mesure.
Et les compteurs collectifs ?
Particulièrement sur le marché locatif privé, il existe encore des compteurs électriques collectifs. Le titulaire du compteur collectif recevra plusieurs allocations, en fonction de la composition des familles qui occupent les logements de l'immeuble et il répercutera le bénéfice de l'allocation à chaque client desservi par ce compteur collectif… Une tâche qui ne s'annonce pas simple ! Cette mesure est accompagnée d'une obligation à l'horizon 2024 du démantèlement de ces compteurs collectifs et de l'installation de compteurs individuels (un compteur par logement).
Il conviendra d'être attentif aux ménages à faibles revenus qui pourraient être impactés négativement par cette mesure (ménages qui utiliseraient l'électricité comme chauffage d'appoint ou disposeraient d'équipements de mauvaise qualité) et de les accompagner vers une amélioration de la performance énergétique de leurs logements et de leurs équipements afin que leur consommation diminue.
Il est prévu que la CWaPE réalise une évaluation après un an de fonctionnement.
Référence légale :
Arrêté du 16 janvier 2014 du Gouvernement wallon relatif à l'obligation de service public à charge des gestionnaires de réseau de distribution favorisant l'utilisation rationnelle de l'énergie.